Cet article traite spécifiquement de l’impôt et des taxes de vente des États américains
Dans un contexte d’affaires de plus en plus transfrontalier, de nombreuses sociétés canadiennes cherchent à développer leurs activités aux États-Unis. Cette expansion soulève toutefois des questions complexes, notamment en matière d’impôt sur le revenu — au niveau fédéral (IRS) et des États américains, ainsi qu’aux fins de taxes de vente.
Voici un survol structuré des éléments essentiels à connaître au niveau des États américains avant de vous lancer dans le développement des affaires aux États-Unis.
1. Comprendre le « nexus » fiscal : la clé de l’assujettissement
Le nexus représente le lien suffisant entre votre entreprise et un État américain, permettant à celui-ci d’imposer des taxes ou impôts.
Ce lien peut être :
- physique : bureau, entrepôt, employés;
- économique : seuil de ventes atteint dans l’État, même sans présence physique.
Chaque État a ses propres critères. Certains se basent sur le chiffre d’affaires, d’autres sur la notion plus large de « faire affaire dans l’État ».
2. La Public Law 86-272 : une protection limitée
Cette loi fédérale restreint l’imposition de l’impôt sur le revenu par les États lorsque l’activité se limite à la sollicitation de commandes de biens corporels, dont les commandes sont acceptées et expédiées à partir d’un endroit situé à l’extérieur de l’État.
Mais attention :
- Elle ne couvre pas les services, logiciels ou licences.
- Elle s’applique uniquement à la sollicitation : toute autre activité (installation, service après-vente, etc.) est exclue de la protection.
- Elle ne protège pas automatiquement le commerce international, car la loi vise le commerce interétatique. Certains États l’étendent au commerce international, d’autres non.
3. La convention fiscale Canada–États-Unis : utile, mais incomplète
La convention vise à éviter la double imposition, mais elle s’applique exclusivement à l’impôt fédéral américain, et non aux États, qui choisissent ou non d’y faire référence.
Au niveau fédéral, un revenu n’est imposable que s’il provient d’un établissement stable, tel qu’un :
- bureau, succursale ou usine;
- agent dépendant pouvant conclure des contrats.
Exclusions : activités auxiliaires, entrepôts de stockage, filiale américaine indépendante (sauf si elle agit comme agent dépendant et qu’elle a le pouvoir de négocier et/ou de conclure des contrats aux États-Unis).
Attention : certains États ignorent la convention et imposent malgré tout si leurs propres critères de nexus sont remplis.
4. D’où vient le revenu, selon les États?
Chaque État détermine ses propres règles de sourcing du revenu.
Pour les biens tangibles :
- Plusieurs États utilisent une répartition des revenus basée sur la destination (« destination based sourcing ») : la vente est attribuée à l’État où le bien est livré ou utilisé, peu importe le transfert du titre de propriété.
- D’autres se basent plutôt sur le lieu du transfert du titre de propriété.
Pour les services :
- Le market based sourcing s’impose de plus en plus : le revenu est attribué à l’État où le client bénéficie du service, même si le service est rendu à l’étranger.
- Cela dit, certains États peuvent encore ne pas imposer si le service est effectué hors des États-Unis.
Pour les biens intangibles :
- La source du revenu est généralement déterminée par le lieu où le droit (redevance, droit d’auteur, brevet) est utilisé ou exploité.
5. Taxes de vente aux États-Unis : des seuils à surveiller
Depuis la décision Wayfair, de nombreux États imposent une obligation de perception de la taxe de vente dès qu’un seuil de ventes ou de transactions est franchi sur le marché américain, même sans présence physique.
Cela concerne :
- les ventes B2C;
- et parfois les ventes B2B.
Les sociétés canadiennes doivent donc vérifier leurs seuils d’activité dans chaque État (généralement 100 000 $US) et s’enregistrer si nécessaire.
6. Bonnes pratiques pour rester conforme
Voici quelques conseils pour limiter les risques et optimiser votre conformité :
- Analyse État par État : chaque État applique ses propres règles d’assujettissement, de sourcing et de calcul de l’impôt.
- Surveillez vos seuils de chiffre d’affaires ou de transactions pour l’impôt sur le revenu ET la taxe de vente.
- Vérifiez vos protections : ne présumez pas que la convention fiscale ou la PL 86-272 vous protège dans tous les cas.
- Documentez tout : gardez des traces détaillées de vos activités, revenus et services aux États-Unis pour appuyer votre position en cas de vérification.
Un terrain complexe qui exige une stratégie sur mesure
L’assujettissement des sociétés canadiennes à l’impôt et aux taxes de vente dans les différents États américains est un domaine complexe, en constante évolution. Il exige une analyse personnalisée, rigoureuse et actualisée.
Vous songez à vous implanter ou à croître aux États-Unis? Parlez-en à votre conseiller fiscal chez Demers Beaulne. Nous sommes là pour vous aider à structurer vos activités, éviter la double imposition et assurer votre conformité dans chaque État.

Marie-Claude Péthel















